Paru dans l'Echo de Bougie 11/2004
Rapporté par Roland Pêtre

Amiral comte Louis Henri de Gueydon

Amiral comte Louis Henri de Gueydon
Gouverneur Général de l'Algérie
d'avril 1871 à juin 1873
Nous avons tous déambulé sur cette place*, lieu mythique de notre ville de Bougie, mais nous-sommes-nous posés la question de savoir qui fut vraiment l’homme à qui cette place devait son nom ?
C'est Clément Martel, maire de Bougie de 1892 à 1900, qui proposa de baptiser cette place, de Gueydon.
Nous savions tous que ce nom était celui de cet amiral qui fut gouverneur général de l’Algérie, mais encore !
Nous avons entrepris quelques recherches pour vous et en savoir plus aussi. Pas de trace de de Gueydon dans le dictionnaire Larousse. Nous n'avons pas trouvé de biographie le concernant. Il nous faudra ouvrir le dictionnaire des marins français pour le retrouver.
Dans notre monde moderne nous avons été également au plus rapide dans nos recherches et Internet, avec ses moteurs de recherche, emmène une multitude de pistes mais rien de complet, tout est fait de petits morceaux qu’il n’est pas facile de rassembler (nous trouvons des dizaines de sites ou pages Web qui parlent à un moment donné de de Gueydon). Et comme il existe plusieurs de Gueydon qui ont servi dans la Royale.... !
Les Services Historiques de la Marine, contactés par l’intermédiaire d’Internet, nous ont adressé un courrier très officiel accompagné des états de services de l’amiral (en réalité vice-amiral, on utilise le titre d’amiral lorsque l’on s’adresse à eux. La dignité d’amiral équivaut à celle de maréchal de France, elle est très restrictive puisque non décernée depuis 1869.
Avec les différents éléments recueillis, nous avons pu rassembler les points forts de la vie de cet amiral. Nous lui rendons hommage dans ce qui suit :

C’était au 19ème siècle :

Louis Henri de Gueydon né le 22 novembre 1809 à Grandville (Seine-Inférieure).
Fils de Henri Jean François et de dame Jeanne Jacqueline Le Coupe.
Il épouse à Paris le 18 avril 1844, Louise Cécile Octavie de Colombet de Landos.
Il décède à Landerneau (Finistère) le 2 décembre 1886.
Il rentre au service de la Marine le 10 novembre 1825 :

- Aspirant de 2ème classe le 23 septembre1827
- Aspirant de 1ère classe le 1er septembre 1828
- Enseigne de vaisseau le 31 décembre 1830
- Lieutenant de vaisseau le 1er janvier 1835
- Capitaine de frégate le 30 avril 1840
- Capitaine de vaisseau le 19 octobre 1847
- Contre-amiral le 2 décembre 1854
- Vice-amiral le 4 mars 1861
Maintenu sans limite d’âge dans le cadre d’activité (21 novembre 1874).

Commandements successifs :
- 1837 - 1840 Le Dunois
- 1845 - 1848 Le Génie
- 1850 - 1852 Le Henri IV
- 1856 - 1858 Le Cléopatre
- 1866 - 1868 L’Escadre
- 1870 - 1871 L’escadre du Nord

Décorations dont il fut honoré :
- Chevalier de la Légion d’Honneur le 28 avril 1841
- Officier de la Légion d’Honneur le 7 septembre 1850
- Commandeur de la Légion d’Honneur le 15 décembre 1851
- Grand officier de la Légion d’Honneur le 31 décembre 1862
- Médaille Militaire le 30 décembre 1862
- Grand Croix de la Légion d’Honneur le 28 janvier 1871
- Officier de l'Instruction Publique le 11 septembre 1872.

Il figure dans le dictionnaire des Marins français d’Etienne Taillemite (édition 1982). Voici ce que l’on y trouve :

GUEYDON (Louis-Henri, comte de)

Né à Granville le 22 novembre 1809, il entra au Collège naval d'Angoulême en novembre 1825 et en sortit major de sa promotion. Aspirant de Ire classe en septembre 1828, il fit campagne sur la Victorieuse puis passa sur l’Emulation avec laquelle il participa à l'expédition d Alger (1830). Enseigne de vaisseau en décembre 1830 il embarqua sur le Faucon (1831), sur l'Héroïne à la station du Brésil et de la Plata (1832-1833) et sur la Gazelle (1834-1835)- Lieutenant de vaisseau en janvier 1835, il servit sur la Créole à la station des côtes occidentales d'Afrique (1835-1836) et sur le Jupiter en Méditerranée. Commandant le Dunois, il se signala dans l’escadre de Baudin lors de l'expédition du Mexique et fut remarqué par le prince de Joinville lors des attaques contre Saint-Jean d'Ulloa et contre Véra Cruz. Ces brillants services lui valurent d'être promu capitaine de frégate en avril 1840. Second sur le Moniebello, puis sur l’Inflexible en escadre d'évolutions (1841-1842), membre de la Commission des chiourmes en 1843, il reçut en février 1845 le commandement du brick le Génie avec lequel il fit une campagne de près de quatre ans aux Antilles et dans le Pacifique, se livrant a de multiples activités diplomatiques (règlement d'un conflit au Venezuela) et scientifiques (étude sur la flore des îles Galápagos). Promu capitaine de vaisseau en octobre 1847. il rentra en France sur un vapeur anglais pour étudier le fonctionnement de ce bâtiment. Gueydon s'était toujours beaucoup soucié de la bonne tenue des navires sur lesquels il servait aussi fut-il nommé en janvier 1849 membre de la Commission de révision des installations des bâtiments de la flotte
Commandant en 1850-1851 le vaisseau le Henri IV en escadre d'évolutions, il participa en novembre 1851 au bombardement de Salé (1). Membre du Conseil des travaux en décembre 1852, il fut nommé en juin 1853 gouverneur de la Martinique et fut très apprécié des habitants qui adressèrent au ministre de nombreuses pétitions pour obtenir son maintien en fonctions lorsqu'il quitta l'île en septembre 1856 (2) pour prendre le commandement de la station navale des Antilles et du Mexique avec pavillon sur la Cléopâtre. Il avait été promu contre-amiral en décembre 1854. Préfet maritime de Lorient de décembre 1858 à octobre 1861 puis de Brest (3), vice-amiral en mars 1861, Gueydon prit en mars 1860 le commandement en chef de l'escadre d’évolutions avec pavillon sur le Solférino Vice-président du Comité consultatif des colonies en mai 1868, membre du Conseil d'amirauté en mai 1870 commandant l'escadre du Nord sur l’Océan en 1870-1871, il participa aux opérations en mer du Nord pendant la guerre franco-prussienne et assura le blocus de la baie de la Jade. Nommé en avril 1871 gouverneur général de l'Algérie (4), il eut à faire face à l'insurrection de la Kabylie, réorganisa les finances et prépara de nouvelles lois sur la propriété arabe. En souvenir de son administration, le nom de Port-Gueydon fut donné a une commune de la côte kabyle. Maintenu en activité sans limite d'âge, il rentra en France en juin 1873 et fut mis en disponibilité. Président de la Société d'études maritimes et coloniales en 1876, l'amiral de Gueydon tut élu députe de la Manche lors des élections d'octobre 1885 et siégea sur les bancs royalistes.
Il mourut le 1er décembre 1886 au château de Kerlaran près de Landerneau (Finistère).

On lui doit plusieurs ouvrages :
La vérité sur la marine (1849),
Organisation du personnel à bord (1852),
Tactique navale (1867)
L'équité politique (1871).

(1) Il participa, sous les ordres du contre-amiral Dubourdieu, au renouvellement de l’opération perpétrée en 1765 contre Salé (face à Rabat sur la rive droite de l'oued Bouregreg) pour faire cesser les pirateries des habitants de cette ville.

(2) En Martinique le nom de Gueydon est associé à de nombreux édifices, rues, lotissements, hospices, écoles et surtout la fameuse fontaine Gueydon ou aboutissait l’acqueduc qui emmenait l’eau de Didier à la ville de Fort-de-France.

(3) A Brest sous son préfectorat, un nom fut donné à un quai et un pont , pont flottant qui permet le passage des navires de guerre, et qui relie le quartier de la Recouvrance au centre de Brest. Une chanson immortalise ce pont. Ce pont fut détruit lors des bombardements anglais au cours de la dernière guerre et reconstruit plus tard. Son nom est aussi donné dans cette ville à de nombreux bâtiments et endroits publics. Le patronyme de Gueydon est répandu dans cette région.
Il fonde dans cette même ville l’École des Pupilles de la Marine.

(4) Sous son gouvernorat Bougie devint sous-préfecture et un port militaire de premier ordre. Ce port perdit plus tard ce prestige au profit de Mers-el-Kébir. On distingue souvent sur des cartes postales anciennes, des navires de guerre ancrés dans le golfe avant que le port prenne les dimensions que nous lui connaissions.

Les Cahiers du Centenaire de l’Algérie lui rendent un vibrant hommage dans le livret 5.
Ce site vous en dira plus : http://aj.garcia.free.fr/Livret5/L5p16-17.htm (chapitre III).

En Algérie son nom est associé à de nombreux endroits ou sites, la ville de Port Gueydon, des rues, des places, à Oran un bassin du port porte aussi son nom, pour ne citer que ceux là.




Après son décès en 1886 son nom ne disparut pas pour autant.

Dans la Marine de guerre

Son nom fut donné à une classe de navires militaires : navires de classe Gueydon, des croiseurs-cuirassés.
Un de ces bâtiment porta son nom. Construit à Lorient de 1897 à 1899, mis en service le 1er septembre 1903, il servit jusqu’en 1943.

Voir aussi le dictionnaire - répertoire des navires de guerre français pour description : perso.wanadoo.fr/hubert.michea/repertoirenavires.html
Ce navire, en fin de carrière, servit comme navire école pour la formation des mousses,plus précisément les apprentis gabiers.

Deux autres unités furent construites : le Dupetit-Thouars et le Montcalm.


Dans la Marine marchande et le transport de passagers :

En 1922 son nom fut donné à un paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique : le Gouverneur Général Gueydon. Paquebot de 4513T. En décembre 1942 fut saisi à Bizerte par les forces de l’Axe et passa aux Italiens, bien qu’il semble ne jamais avoir navigué sous leur pavillon. Il fut sabordé début mai 1943 à Bizerte lors de l’évacuation des troupes allemandes. N’a pu être réparé et sera détruit en 1945.

Ce type de bâtiment fut construit à quatre exemplaires : Général Grévy - Général Jonnart et Gouverneur Général Chanzy.
Il participe les 6 et 7/01/1942 au sauvetage d’une partie des passagers du Lamoricière qui sombra au large des Baléares.
(A rechercher dans le site : http://www.frenchlines.com)

Au préalable à ce dernier, un autre paquebot de la Compagnie des Chargeurs Réunis porta le nom d’Amiral Gueydon.Ce bâtiment termina sa carrière sur les côtes de Somalie en juillet 1903. Il fut pris dans une violente tempête au large de l’îlot de Socotora, un incendie se déclara à son bord et il dut être échoué sur la côte entre Aden et Mascate pour éviter la perdition de l’équipage et des passagers. Ces faits sont relatés dans le Petit Journal du 11 octobre 1903 :

L’Amiral Gueydon est à gauche sur la photo caractérisé par les étoiles sur les cheminées, signe distinctif de la Compagnie des Chargeurs.



L’Amiral de Gueydon eut au moins un fils, Paul Albert comte de Gueydon, qui fut lui aussi vice-amiral. Un amiral de grand renom également si l’on en croit le dictionnaire des Marins français où il figure à la suite de son père. On retrouve aussi son nom lié à un cru de Graves de Bordeaux : Château de Bordeaux. Ceci s’explique par le fait qu’il fut propriétaire de ce château suite à ses épousailles avec la comtesse de Tessier de Cadillan qui en avait hérité de son père. Ce château fut revendu plus tard par la famille.

Il y aurait beaucoup plus à dire mais nous pensons que les éléments recueillis reflètent l’ampleur de cet homme dans l’histoire et pour nous celle de l’Algérie.
 
Recherches et mise en page pour CeuxdeBougie : Roland Pêtre

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