Voici ce que nous disait Marcel,
« Un petit récit personnel au sujet de ces navires.
De 1942 à 1946, il m’a été donné de travailler dans une Agence Maritime et de côtoyer le travail de ces petits caboteurs côtiers. Du 11 Novembre 1942 à 1945, les forces alliées avaient interdit la navigation des balancelles, pour cause de guerre. Au paravent, ces bateaux étaient utilisés pour le transport de sable depuis les plages de la côte ouest (Oued Dass ou Boulimat, par exemple), sur le port de Bougie. Ce sable de grosse granulométrie n’étant pas encore fabriqué par les carrières de Sidi-Yahia, alors que l’on en trouvait sur ces plages, sable très recherché pour le bâtiment, pour les crépis extérieurs. La balancelle s’approchait de la plage, et quelques ouvriers, avec de gros couffins en alpha, remplis de cet agrégat, grimpaient à bord, sur un simple madrier et le versaient dans la cale. La balancelle revenait au port et de la même façon, le sable était déchargé à quai. Je plaignais ces dockers pour ce dur et pénible travail. La guerre ralentit les rotations de cargos entre la France et l’Algérie. Un seul navire prenait le fret pour notre port et aussi pour Djidjelli, en évitant cette deuxième escale. A nous, compagnies de navigation, d’acheminer sur Djidjelli les marchandises destinées à ce port. Les balancelles nous ont rendu service. J’ai connu trois de ces navires dirigés par leurs patrons : Monsieur Cocurullo et Monsieur Buono. Egalement un Djidjelllien, Monsieur Celice, en possédait une (balancelle).
Une concurrence s’était engagée avec des transporteurs routiers. Ils possédaient à cette période, des camions fonctionnant au gazogène. Un avantage pour ces camions, ils pouvaient charger et décharger en dehors des ports et ne craignaient pas la mauvaise mer.
Vu la pénurie de carburant, je pense que la balancelle devait assurer ses déplacements de port en port à l’aide de leur moteur diesel, mais qu’après avoir franchi les passes ils naviguaient toutes voiles dehors ».