Il n’y eu jamais une vraie politique de recherches des sources du Gouraya, comme le signalait un "hydrologue" de l’époque Lucien Ferlay. Il faisait paraître des articles très critiques dans la presse locale face à l’incurie de la Municipalité. Il ne fut jamais écouté, ses rapports restant lettre morte.
La population allant toujours en croissant, ces sources devinrent encore insuffisantes. La pompe des Aiguades de plus en plus capricieuse ; elle créait des soucis d’entretien à la municipalité jugeant cet apport d'eau insuffisant et onéreux. Elle fut abandonnée début des années 1920 puisque le matériel fut mis aux enchères en 1927 (en 1933 il n’était pas encore vendu !). C’est un M. Gaspard Abram qui pendant dix ans veilla au bon fonctionnement de cette machine.
Quelques anecdotes sur ces sujets « brûlants » à l’époque. En 1907, par un avis municipal, la population est informée que la ville sera privée d’eau, la conduite de Toudja étant coupée et celle des Aiguades ne marchant pas ! Dès l’annonce reçue, la population se précipita avec force bidons, arrosoirs, gargoulettes et autres récipients, aux citernes pour y faire provision. Une mémorable bousculade s’ensuivit qui marqua l’histoire de Bougie. Des tuyaux manquaient pour réparer la conduite de Toudja. La raison en venait à l’état désastreux de ceux-ci, percés comme des marmites à couscous (dixit la Presse), et le manque flagrant d’entretien par les municipalités qui se succédaient. On appela cette journée la « Journée des bidons ».
Bougie revécue cela en 1930 suite à une tornade qui s’abattit sur la région endommageant les conduites.
Mais il fallait continuer à prospecter et à innover. La ville avait besoin de plus en plus d’eau.
Dés 1892, un certain M. Coing un entrepreneur qui participait à l’entretien de la pompe des Aiguades, parlait déjà d’arrêter cette pompe et d’emmener cette eau à Bougie sans machine ! Etait-il visionnaire ? En 1929, après que la corniche de contournement (3) du cap Bouak fut réalisée, un projet vit le jour pour la mise en place d’une nouvelle conduite empruntant cette corniche pour l’amenée des eaux par gravitation, système proposé par nos « Spécialistes ». Ces travaux furent réalisés au cours de l’année 1931. Seront à la même époque remises en état les sources de Romane et Clauzel.
Cette eau était acheminée par une conduite en fonte de diamètre 120, qui circulait ensuite sous le revêtement de circulation de la corniche du cap Bouak. Certains s’en souviendront car cette conduite affleurait à certains endroits. Elle continuait ensuite le long de la baie de Sidi Yahya pour se terminer en contre bas du square, que nous appelions «Square de la Sous-Préfecture », et déversait cette eau dans deux grandes citernes de stockage en béton et de forme cylindrique. Elles étaient bien visibles en contre bas de ce square et en arrière de la porte Sarrazine. Cette eau, à l’époque, alimentait la Marine, le Port et les quartiers bas de la ville. La pression était nettement insuffisante ce qui créait pas mal de problèmes dans la distribution. L’ingénieur qui veillait au bon fonctionnement de cet ensemble de la source des Aiguades, était un M. Cevaneski (4).
Pour compléter cette « histoire » de l’alimentation d’eau à Bougie, il faut rappeler qu’en 1892, un projet d’amenée des eaux de Toudja (source d’Aïn Seur) (6) fut envisagé. Les communes concernées par Toudja durent abandonner un cinquième du débit pour l’approvisionnement de Bougie. Ce projet aboutit en 1896 sous la municipalité de M. Clément Martel, un habile gestionnaire. C’est une conduite d’environ 21 kms de tuyaux en fonte, dont une partie passait par le tunnel construit par les Romains en arrivant sur les hauts de la ville par relevage naturel (certainement par l'effet belier), qui fut mise en place par les Ponts & Chaussées. Ouvrage très technique face à la faible différence de niveau jusqu’aux citernes.
Ces alimentations, Aiguades et Toudja, furent renforcées en 1935, quand la ville fut reliée par le branchement des sources de Kéfrida (5) (au dessus de Darguinah). Il était temps car Toudja nécessitait une remise en état complète ainsi que celle des Aiguades. Pour Toudja, la nature sulfatée des terrains, que traversait la canalisation, était à l’origine de la corrosion extérieure entrainant des perforations aux tuyaux. La aussi, la Municipalité ne tint pas compte d’avis d’experts d’Alger qui avaient préconisé le relèvement de la conduite et son goudronnage extérieur. Un important volume d’eau était ainsi perdu. La Municipalité ne vivait que dans le futur : « Kéfrida » ! Le Contribuable était donc sollicité.
Ce même hydrologue, M. Ferlay (7) dénigré pendant longtemps par la Municipalité, avait proposé à maintes reprises d’étudier des projets tel celui du pompage par filtration des eaux de la Soummam (voir article Kéfrida).
Bien entendu, il faut lire la Presse de l’époque pour se faire une idée du climat qui pouvait régner durant ces années. Il y avait de quoi faire.
Nous devons rajouter, mais sans aucunes archives à proposer, qu’une dernière adduction d’eau fut engagée sous la municipalité de Jacques Augarde : celle de l’Oued Djemaa. Cet oued traverse l'ancien domaine Poizat peu avant le Cap Aokas. Entre Kéfrida et Djemaa ne fut assuré que l’entretien des réseaux existants. Nous pouvons aussi préciser qu’à la suite de Djemaa, et jusqu’à ce jour, aucun projet n’aurait vu le jour !
NDLR - Voici rapidement ce que nous avons pu reconstituer sur l’approvisionnement en eau de notre Ville. Nous nous sommes basés principalement sur la Presse de l’époque, d’un extrait du livre « Bougie la Perle de l’Afrique du Nord » de Louis Salvator de Habsbourg, Archiduc d’Autriche lors d’une escale à Bougie en 1897, d’autres documents découverts sur Internet et de maigres témoignages.
article paru dans le bulletin 2016
et signé Roland Pêtre
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Voici une photo récente d'une des deux citernes qui existe encore
Sur ce tableau peint par Roland Atlan on apperçoit bien les deux citernes dont nous parlons dans le texte.
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